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  • Photo du rédacteurBenoît ROSTAND

Les syndics en ligne

Dernière mise à jour : 8 juin 2021



Syndic n’est pas un métier comme les autres. Outre le fait que son gestionnaire se mette à l’entière disposition des copropriétaires dès potron-minet jusqu’au crépuscule, il composera avec une multitude de caractères et de talents. Au-delà d’un métier, si ce n’est une vocation, il s’agit bel et bien d’un sacerdoce. Travaillant plus de 46 heures par semaine (données ANCG / sept. 2020), passant peu de soirées en famille pour les sacrifier en assemblée générale tout au long de l’année, submergé par un flux interrompu de courriels représentant une charge psychologique permanent, le gestionnaire est malheureusement jugé peu réactif eu égard aux honoraires demandés. Aussi, beaucoup de copropriétés décident de s’affranchir de ce syndic professionnel incompétent pour se constituer eux-mêmes syndic.

Il s’agit d’une excellente idée dans le cas de petites copropriétés (jusqu’à 15 appartements et/ou commerces) dans lesquelles il n’y a aucun conflit (impayés notamment). Cette gestion apporte un art de vivre différent, l’ensemble des copropriétaires se sentant impliqué dans la vie de l’immeuble. L’intérêt du recours au syndic non professionnel est aussi économique. Au-delà d’une renégociation régulière des contrats (assurance, nettoyage, électricité, etc.), le syndicat économise les honoraires pratiqués par un syndic professionnel.

Mais, comme il a été écrit plus haut, devenir syndic bénévole requiert d’avoir de la disponibilité ainsi que des compétences juridiques et comptables. Aussi, des cabinets de syndic professionnel ont eu l’idée de proposer un contrat de syndic allégé, en permettant aux copropriétaires de s’occuper eux-mêmes de leur bien commun tout en les délestant des tâches administratives et comptables. Ce sont des syndics dit « à distance », « en ligne » ou low-cost ». Ils proposent un compromis entre une gestion professionnelle et une gestion bénévole, pour des honoraires annuels compris d’environ 100 € TTC par lot principal, avec un plancher d’environ 250 € TTC.

Ces syndics se limitent à assurer le back-office, c’est-à-dire une gestion administrative et comptable en se reposant presque exclusivement sur un ou plusieurs membres du conseil syndical pour le reste. Ce qui impose deux conditions impératives : la présence effective d’au moins un copropriétaire occupant l’immeuble, et une connexion internet.

Ces syndics en ligne sont, par exemple, lebonsyndic.com (réseau immobilier marseillais Sinéo) ou encore Syndic One (propriété de Sergic).

1. Quelles missions ?

1.1. Quelles sont les missions obligatoires des syndics professionnels

Qu’elles soient incluses dans le forfait de base ou pouvant faire l’objet d’une facturation supplémentaire, les missions obligatoires de tout syndic sont :

- Assemblée Générale annuelle

o Préparation de l’assemblée générale (établissement de l’ordre du jour ; mise à disposition de tous les copropriétaires des différentes pièces comptables)

o Convocation de l’assemblée générale (élaboration et envoi de la convocation)

o Tenue de l’assemblée générale (présence du syndic ou de son représentant ; établissement de la feuille de présence ; rédaction du procès-verbal ; tenue du registre des procès-verbaux)

o Informations relatives aux décisions prises en assemblée générale (envoi et notification du procès-verbal aux copropriétaires opposants ou défaillants ; affichage du procès-verbal dans les parties communes)

- Conseil syndical

o Mise à disposition et communication au conseil syndical de toutes pièces ou documents se rapportant à la gestion du syndicat ou des lots gérés (notamment par accès en ligne sécurisé)

o Recueil des avis écrits du conseil syndical lorsque sa consultation est obligatoire

- Comptabilité du syndicat

o Établissement des comptes de gestion et des annexes

o Établissement du budget prévisionnel

o Présentation des comptes

o Tenue des comptes de chaque copropriétaire

o Appels des provisions sur budget prévisionnel, sur régularisations de charge, des cotisations du fonds de travaux, etc.

o Imputations des consommations individuelles de fluide ou d'énergie

o Recouvrement des créances auprès des tiers

o Vérification et paiement des factures des fournisseurs et prestataires

o Attestation de TVA aux fournisseurs et prestataires

o Ouverture d'un compte bancaire séparé ou, le cas échéant, d'un sous-compte individualisé en cas de dispense expresse

- Immatriculation du syndicat

- Élaboration et mise à jour de la fiche synthétique de copropriété

- Gestion de tous les audits, diagnostics et dossiers obligatoires

- Établissement et mise à jour du carnet d'entretien

- Établissement et mise à jour de la liste des copropriétaires

- Détention et conservation des archives (règlement de copropriété, état de répartition des charges, état de division, plans, procès-verbaux des assemblées générales, diagnostics techniques, contrats)

- Transmission des archives au syndic successeur

- Mise à disposition d'un accès en ligne sécurisé aux documents dématérialisés relatifs à la gestion de l'immeuble ou des lots gérés, sauf décision contraire du syndicat des copropriétaires

- Visites et vérifications périodiques de la copropriété, avec ou non rédaction d'un rapport, avec ou non la présence du président du conseil syndical

- Gestion des travaux d'entretien courant et de maintenance

- Établissement, au moins tous les trois ans, de la liste des travaux d'entretien et de conservation des parties communes et des éléments d'équipement commun nécessaires dans les trois années à échoir, en vue de la constitution de provisions spéciales

- Appel d'offres, étude des devis et mise en concurrence résultant de la demande d'une pluralité de devis ou de l'établissement d'un devis descriptif soumis à l'évaluation de plusieurs entreprises lorsque celle-ci est obligatoire dans le cadre des travaux de maintenance

- Souscription des polices d'assurance au nom du syndicat

- Déclaration de sinistre concernant les parties communes et les parties privatives quand le sinistre a sa source dans les parties communes, déplacement sur les lieux, prise de mesures conservatoires, assistance aux mesures d’expertise, suivi du dossier auprès de l’assurance et gestion des règlements aux bénéficiaires

- Gestion du personnel (recherche et entretien préalable ; établissement du contrat de travail et de ses avenants éventuels ; gestion des procédures de rupture du contrat de travail ; paiement du salaire ; tenue du livre des salaires ; édition des bulletins de paies ; déclarations et paiement aux organismes fiscaux et sociaux ; gestion des remplacements pendant les congés, arrêts maladie et maternité ; mise en place et mise à jour du document unique d'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs ;gestion de la formation du personnel du syndicat ; contrôle d'activité du personnel du syndicat).

Rien n’empêche le syndic professionnel d’ajouter des prestations à cette liste. En revanche, il lui est interdit de supprimer l’une quelconque de ces missions.

1.2. Missions du conseil syndical

Par définition, le conseil syndical assiste le syndic dans sa gestion quotidienne ou du moins pour toutes questions relatives à la copropriété (surveillance de l’immeuble, vérification des factures, établissement des budgets courants et des budgets travaux, etc.).

Il contrôle aussi la gestion du syndic (contrôle de la bonne tenue des comptes en exécutant leur rapprochement avec les feuillets bancaire, vérifier leur bonne répartition en fonction des tantièmes de chaque copropriétaire, étudier les actions engagées pour recouvrer les charges impayées par tout débiteur et quel que soit le montant de l’arriéré ou de la personnalité du débiteur, etc.).

Enfin, il possède une mission consultative pour la mise en concurrence des marchés et contrats lorsque leur coût dépasse un montant fixé par l'assemblée.

1.3. Missions du copropriétaire dit « référent »

Pour les syndics dit en ligne, plusieurs des missions qui incombent normalement au syndic sont purement et simplement supprimées, lorsqu’elles ne sont pas dévolues à un copropriétaire appelé « copropriétaire référent », qui peut être une autre personne que le président du conseil syndical. Ce copropriétaire référent exécute ce que ne fera pas le syndic en ligne.

2. Responsabilités

Même s’il est hélas fréquent qu’un syndic professionnel se borne à entériner les démarches accomplies par le conseil syndical en adressant par exemple un ordre de mission aux entreprises entrant dans le cadre de la gestion courante, il existe cependant de sérieux risques en termes de responsabilité pour les membres du conseil syndical ou l’un quelconque des copropriétaires s’immisçant dans les missions qui appartiennent légalement et sans délégation possible au syndic. En cas de mise en cause, qui endosserait la responsabilité ? le copropriétaire référent, le conseil syndical qui n’a pas procédé à sa mission d’assistance ou de contrôle, ou bien le syndic qui est le véritable représentant mandataire de la copropriété ?

2.1. du Syndic en ligne

2.1.1. Assemblée générale

Comme il a été écrit ci-dessus, l’une des obligations du syndic est la tenue des assemblées générales, de sa préparation à la convocation et sa tenue, sans compter la diffusion de l’information du procès-verbal. Mais les syndics en ligne prévoient que les assemblées générales se dérouleront sans présence du syndic., les participants devant assurer eux-mêmes le contrôle de la validité des pouvoirs, l’émargement de la feuille de présence et le secrétariat de la séance…

Ces syndics rédigent cependant des procès-verbaux en blanc, reprenant toutes les résolutions et les majorités de vote correspondantes, comme ils le feraient lorsqu’il est le secrétaire en présentiel de la réunion. Ce n’est donc aucunement une avancée, surtout avec les logiciels existants. Et les formules dites Box AG ne sont que du flan pour cette même raison. Ces syndics précisent dans leur contrat que le gestionnaire peut être joignable à tout moment par téléphone ou autre moyen électronique, en cas de questions épineuses qui pourraient surgir en cours de séance. Force est de constater que nombre de gestionnaire sont inscrits aux abonnés absents.

L’absence de présence physique du syndic est donc contraire à la loi du 10 juillet 1965, dans la mesure où ce syndic professionnel livre l’objet de son mandat à lui-même. La responsabilité du syndic pourrait être recherchée pour défaut de devoir de conseil.

Pire, les règles régissant la tenue des assemblées générales étant très formalistes et rigoureuses, leur non-respect entraînera la nullité des décisions prises, voire celle de l’assemblée générale elle-même.

2.1.2. Comptabilité

2.1.2.1. Exercice comptable

Certains syndics en ligne font fi de la volonté du syndicat des copropriétaires, notamment en ce qui concerne les dates de l’exercice comptable. Souvent, les syndics bénévoles se calent sur une année calendaire (du 1er janvier au 31 décembre), alors que les syndics professionnels demandent un exercice décalé pour étaler les réunions d’assemblée générale sur l’année. Mais cela se décide uniquement en assemblée générale, par l’introduction d’une résolution.

Syndic One a décidé d’office que « le contrat démarre le 1er jour du trimestre calendaire suivant l’assemblée générale de sa nomination ». Où est la volonté du syndicat ?

2.1.2.2. Reprise comptable

Certains syndics en ligne considèrent qu’’il n’existe pas de reprise comptable lorsque l’immeuble a été géré par un syndic non professionnel ou lorsque des éléments manquent à l’appel. « Syndic One démarrera sa gestion avec des comptes à zéro, sans reprise comptable ni reconstitution de l’antériorité comptable ». Il occulte tout simplement le passé du syndicat des copropriétaires, sans se soucier de l’existence de fournisseurs impayés (ou trop payés), de la présence de copropriétaires débiteurs ou créditeurs, de la trésorerie disponible. Comment justifiera-t-il les comptes qu’il devra présenter en assemblée générale. Outre le fait que ce soit illégal, cette clause est une absurdité comptable.

Pire, Syndic One affirme que « il appartient à l’ancien syndic de régulariser les situations créditrices ou débitrices des copropriétaires ». Ce syndic professionnel en ligne est jusqu’au-boutiste dans la violation de la loi et la décharge de toute responsabilité.

2.1.2.3. Compte bancaire séparé

Obligatoirement, les syndics non professionnels ont ouvert un compte bancaire séparé, au nom du syndicat des copropriétaires, afin de ne pas fusionner les comptes du copropriétaire faisant office de syndic avec ceux du syndicat.

Pourtant, Syndic One oblige l’ancien syndic à clôturer le compte bancaire ouvert au nom du syndicat et s’impose d’en ouvrir un autre… sans décision d’assemblée générale. Ce qui est parfaitement illégal dans la mesure où l’ancien syndic n’a plus aucun mandat pour effectuer un quelconque acte d’administration et de gestion. L’ancien syndic engage donc sa responsabilité personnelle à l’égard de chacun des copropriétaires d’une part et du syndicat des copropriétaires d’autre part.

2.1.2.4. Relève des compteurs divisionnaires

Pire, ces syndics en ligne prévoient dans les décisions d’assemblée générale des mandats spéciaux à l’égard du conseil syndical ou d’un copropriétaire référent. Mais ces délégations spéciales sont très encadrées, afin d’éviter les abus provenant tant de la demande du syndic que du conseil syndical lui-même. Par exemple, en se délestant de la relève des compteurs d’eau par le biais d’un mandat spécial, le syndic se décharge de toute responsabilité en cas d’erreur sur le relevé des index. Qui supportera alors le préjudice ? Le syndicat de copropriétaires ? Le syndic ? Ou bien le conseil syndical qui a procédé au relevé ?

2.1.3. Visite d’immeuble

Les visites d’immeuble font partie des missions obligatoires de tout syndic professionnel. Certains syndics en ligne, appartenant à un réseau national de syndics professionnels, s’organisent pour qu’un de leur gestionnaire effectue cette tâche, voire de le sous-traiter. A noter que cette sous-traitance doit être prise en charge intégralement par le syndic en ligne, dans la mesure où aucune délégation de mandat ne saurait se justifier, le contrat de mandat de syndic étant conclu intuitu personae.

Syndic One propose dans son contrat zéro visite et dure zéro minute (au cas où le syndicat des copropriétaires n’aurait pas compris). L’avantage est que toute visite sera réputée être une visite supplémentaire facturable. Le Bon Syndic confie cette mission à un bureau d’étude, qui la facture à la vacation au syndicat des copropriétaires, sans décision d’assemblée générale ad hoc. Ce qui est parfaitement illégal.

2.1.4. Travaux

2.1.4.1. Travaux de gestion courante

Les visites du syndic sont essentielles dans la vie d’un immeuble, ne serait-ce que pour définir le caractère urgent ou non de travaux à entreprendre. Comment un fantôme peut-il se prononcer à ce sujet, sans lui-même jouer à la roulette russe ? Faut-il que le syndic prenne pour argent comptant les dires d’un copropriétaire, réputé non sachant, ou d’un prestataire qui aura tout intérêt à faire ses travaux ? Et si jamais l’urgence était avérée, à qui incomberait une négligence aux conséquences dommageables ? Au copropriétaire référent ? Au conseil syndical ?

Clic Syndic remporte la palme en spécifiant expressément que la prise de mesures conservatoires en cas d’urgence n’est pas incluse dans le contrat, même en facturant cette prestation.

2.1.4.2. Réception des travaux votés en assemblée générale

Dès lors que des travaux votés en assemblée générale ont été réalisés, avant tout paiement du solde de la facture à l’entrepreneur, il va de la responsabilité du syndic mandataire de réceptionner ces travaux.

2.1.4.2.1. Présence d’un maître d’œuvre

Le maître d’œuvre (architecte, bureau d’études, bureau de contrôle) est présent lors de la réception de travaux pour intervenir d’un point de vue uniquement technique, et n’engagera sa responsabilité qu’eu égard à cette mission.

2.1.4.2.2. Absence d’un maître d’œuvre

Le syndic a un devoir de conseil sur les plans juridique et administratif.

2.1.5. Gestion du personnel

Même s’ils ont un coût, les gardiens et les employés d’immeuble sont indispensables pour le confort et la sécurité de tous. Ils ne sont cependant ni les salariés du syndic, ni ceux des copropriétaires. Ils restent et demeurent les salariés du syndicat des copropriétaires. Ils restent aux ordres exclusifs du syndic, lequel assume la direction de l'entreprise et donc le recrutement, la gestion de la paie, des congés des absences etc. ainsi que leur supervision... C'est la raison pour laquelle le syndic refuse, à bon droit, que les conseillers syndicaux et les copropriétaires interviennent dans la supervision, donnent des ordres voire fassent des remontrances aux employés du syndicat.

Mieux, ce sont des salariés autonomes que personne - ni le syndic, ni le conseil syndical, ni les copropriétaires - ne peut superviser aussi étroitement que sont supervisés des salariés internes d'une entreprise. Et le conseil syndical ne doit apporter qu’une assistance discrète, utile mais limitée. Les copropriétés doivent alors faire confiance à leurs employés.

Mais, comment assurer une bonne gestion du personnel de la copropriété, notamment en cas de conflit pouvant aboutir à un entretien préalable avant un éventuel licenciement ? Certains syndics en ligne excluent d’office cette prestation.


2.2. du Conseil Syndical

Le conseil syndical n’est aucunement habilité à engager des actes de gestion ni même à tenir une assemblée générale. Il n’est même pas doté de la personnalité morale et, de ce chef, ne peut voir sa responsabilité engagée. Il ne faut pas oublier que le conseil syndical n'a pas un devoir de conseil ou d'information. Il n'a qu'un rôle consultatif.

Cependant, chacun des conseillers syndicaux engagent sa responsabilité individuellement et/ou solidairement avec d’autres membres. Mais, à moins d’un conflit très personnel et d’un dossier particulièrement bien ficelé, compte-tenu du caractère bénévole dans l’exercice des missions, la responsabilité des conseillers syndicaux est rarement mise en cause dans le cadre d’une procédure devant les tribunaux, même lorsque de mauvais choix ont à l’évidence fait perdre de l’argent à la copropriété.


2.3. du Copropriétaire Référent

Souvent, le copropriétaire référent est le président du conseil syndical, habitant sur place. Il n’est ni salarié, ni employé ni dévot du syndic. Il est simplement bénévole.

Comme chacun des membres du conseil syndical, sa responsabilité pourrait être engagée dans la mesure où il agit sans avoir reçu de mandat de l’assemblée générale.


En conclusion, s’il n’est pas interdit de faire appel à un syndic dit en ligne, il est impératif qu’il exerce l’intégralité des missions incombant à tout syndic, telles qu’elles sont gravées dans le marbre des dispositions du décret n°2015-342 du 26 mars 2015 définissant le contrat type de syndic de copropriété et les prestations particulières, prévus à l'article 18-1 A de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 modifiée fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Dura lex. Sed lex.

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